Soyez vigilants aux multiples causes de ruptures avec l’entourage… 

Certains indicateurs de rupture peuvent vous faire redouter une situation d’abus de faiblesse de la part d’un adulte majeur. Il peut être membre du groupe ou le fréquenter temporairement ou pour une période plus longue.  L’influence psycho-spirituelle peut provenir d’un ou de plusieurs membres d’une structure communautaire.  

1. Un groupe religieux peut être opaque.
Certaines associations-écran peuvent constituer un produit d’appel pour une structure communautaire soucieuse de recrutement, quelle que soit sa taille. La façade exposée en vitrine peut être très différente de l’arrière-boutique réservée aux membres.   

2. Un groupe peut se croire détenteur d’un pouvoir absolu sur les personnes. L’obéissance à un supérieur hiérarchique est un lien de subordination licite. (Un employé est aussi dans un état de subordination vis-à-vis de son employeur). Dans la vie consacrée ou religieuse catholique, personne n’obéit directement à Dieu, sans passer par des intermédiaires. Dans la mesure où l’obéissance à un supérieur couvre tous les aspects du quotidien, son pouvoir hiérarchique doit se limiter au for externe et ne pas inclure l’ouverture de conscience au for interne, dont un accompagnateur spirituel peut seul connaître.

3. Des techniques de manipulation peuvent être mises en œuvre, afin d’obtenir un assujettissement partiel ou total de la personne.
La privation d’informations fiables sur l’origine du groupe (légende dorée) constitue une technique de manipulation éprouvée. La remise en cause de toute source d’information extérieure au groupe doit constituer un signe d’alerte.  

4. La soumission psychologique au groupe peut tendre à un état de sujétion.
Le sentiment d’appartenir à une élite peut servir à renforcer la cohésion du groupe. Inversement, l’absence de soumission totale peut entraîner un contrôle strict, assorti de mesures de rétorsion ou de punition envers la personne ou son entourage. 

5. De multiples sortes d’abus peuvent en résulter.
Les abus d’autorité à caractère spirituel ne sont qu’une des facettes du problème. De nombreux autres abus sexuels, psycho-spirituels, psychiques, physiques ou à caractère financier peuvent être relevés dans un groupe à caractère religieux. S’ils présentent un caractère gravement préjudiciable à la personne, ils la qualification d’infraction pénale pourra être retenue.  

6. Le groupe peut alors se montrer incapable d’empathie avec la personne majeure mise en situation de vulnérabilité.
Le déni de réalité, de la part du groupe, à l’égard d’une personne impactée ou victime d’abus (s’il s’agit d’une infraction à caractère pénal) est monnaie courante. La preuve judiciaire d’un abus sur majeurs est difficile voire impossible à rapporter, puisque les responsabilités sont diluées et que les membres du groupe se couvrent mutuellement. 

7. L’emprise mentale, prenant appui sur la confiance préalable, peut être rendue plus facile au sein d’un groupe religieux. Aucune mise en garde, appel à la raison, à la prudence ou à l’intelligence ne saurait suffire à contrer un mécanisme psychologique. L’emprise mentale, manifestée par des signes de déstabilisation mentale, peut commencer dès avant l’admission dans un groupe religieux et se poursuivre bien après.

8. L’entourage d’une personne mise en état de sujétion doit chercher à ne pas aggraver le traumatisme subi par l’adulte majeur mis en situation de vulnérabilité.

Le lien avec la famille ou l’entourage ne doit pas être coupé, malgré la rupture apparente. Les visites et liens épistolaires doivent être maintenus entre l’adulte mis en état de sujétion et son entourage, en ne donnant lieu à aucun jugement ni affirmation péremptoire. En revanche, en posant inlassablement des questions à la personne concernée, par écrit ou par oral, vous parviendrez à ébranler ses certitudes. La capacité de jugement critique de la personne peut être mise en sommeil. Sauf situation de santé gravissime, elle n’est jamais anéantie.  

<< D’après Yves CASGRAIN, Guide pour aider les victimes, Roxboro, Québec, (Canada), Ed L’Essentiel, 1996. >>